L’ancien président de la Confédération Africaine de Football (Caf) a été suspendu hier mardi 3 août 2021 par l’instance faîtière du football mondial. Il lui est notamment reproché d’avoir enfreint l’article 15 du Code d’éthique de la Fifa.
Comme un coup de massue, cette décision est tombée hier sur le football Camerounais déjà en galère depuis quelques temps déjà. Celui qui aura passé 29 ans (1988-2017) à la tête de la seconde plus grande fédération de football dans le monde vient d’être suspendu, pour une durée d’un an, de toutes activités liées au football. En plus de cette suspension il est également condamné à verser une somme de 19 millions de Fcfa. L’enquête ouverte par la chambre d’instruction de la Commission d’Ethique de la Fifa portait sur l’action d’Issa Hayatou dans la signature d’un contrat qui octroyait la gestion des droits télé et marketings des compétitions Caf jusqu’en 2028 à l’entreprise française Lagardère Sports (LS). Signé en septembre 2016, ce contrat était complètement aux antipodes des principes concurrentiels. En mars 2017, l’entreprise Presentation Sports, également intéressée par ces droits a saisi le gendarme de la Fifa et l’enquête a été ouverte.
Le film de l’enquête
Sur le cas Issa Hayatou, la chambre de Jugement de la Commission d’Ethique Indépendante de la Fifa était composé de 4 membres, le Grec Vassilios Skouris, président ; le Samoan Fiti Sunia, vice président ; l’arabe d’Emirats Mohammad Al Kamali et le Nigérian Ayotunde Phillips comme membres. Cette commission s’est penchée sur cette affaire le 7 mars 2017 après la plainte de Presentation Sports et celle de l’Autorité égyptienne de la concurrence (ECA) portant le même motif. Le 25 mars de la même année le natif de Garoua a été notifié par la Fifa de l’ouverture d’une enquête contre lui relative à d’éventuelles violations des articles : 13 (devoirs généraux), 15 (devoir de loyauté), 25 (abus de position). En septembre et Octobre 2019, l’entreprise PwC sur ordre de la Caf et de la Fifa, a effectué un audit général et une synthèse de la gestion financière de l’instance patronne du football africain afin de déterminer d’éventuelles malversations entre 2015 et 2019. Sommé de faire une déclaration suites aux allégations qui pesaient sur lui, Issa Hayatou va produire une correspondance de 7 pages où il apporte des précisions et réfute l’accusation selon laquelle il n’aurait pas consulté les autres membres du Comité Exécutif de la Caf. Il affirme également dans ce document qu’au moment de la signature du premier contrat avec le groupe Lagardère (2008-2016), ces derniers étaient les seuls postulants. Après écoute de toutes les parties prenantes et de certains témoins, la commission d’enquête a conclu que M. Hayatou avait violé son obligation fiduciaire envers la CAF en agissant contre les intérêts de ladite confédération, en signant au nom de CAF, un accord avec LS au seul bénéfice de cette dernière société. Il a également abusé de sa position au sein de la CAF en exécutant l’accord sans consultation des autres membres du COMEX.
La défense d’Hayatou
Fabrice Robert-Tissot, avocat du Camerounais, a déclaré à la Commission d’éthique qu’aucun élément dans le dossier ne permettait de conclure à une quelconque violation. Par conséquent son client n’aurait pas dû être poursuivi. Il poursuit en disant que le dossier de l’enquête était incomplet mais aussi que cette enquête en question, était biaisée et sélective car la commission n’a recueilli que les éléments contre l’accusé et n’a à aucun moment respecté la présomption d’innocence.
Selon lui, l’entité chargée de mener les investigations sur cette affaire n’a basé ses conclusions que sur les procès-verbaux de la réunion du COMEX du 27 septembre 2016. Ignorant sciemment les procès-verbaux de janvier 2017, où, ceux de 2016 avaient été modifiés et complétés. Il poursuit en disant que ces seconds procès-verbaux auraient pu prouver que Issa Hayatou a effectivement divulgué l’offre de Lagardère Sport à la Caf. Un comité Ad-Hoc aurait même été crée au sein de la Caf pour mener les négociations avec le géant français. Une allégation que les procès-verbaux de la réunion de Janvier 2017 peuvent confirmer. Contrairement à l’accusation, le camp Issa affirme que ces accords n’incluaient pas les droits TV mais uniquement le côté marketing.
Malgré ces précisions apportées, la Chambre de Jugement de la Commission d’Ethique de la Fifa a reconnu le Camerounais coupable. Ladite commission a noté une absence d’offres concurrentes et des négociations exclusives avec Lagardère Sport, la non-transparence lors des négociations avec l’entreprise française, la violation du droit de concurrences et sanctions imposées à la Caf par les autorités nationales et internationales et un certain nombre de responsabilité personnelles de Issa Hayatou. Ce dernier est donc suspendu avec effet immédiat de toutes activités administratives ou sportives liées au football tant au niveau national qu’international pendant un an. Il est également condamné à payer 19 millions de Fcfa sous 30 jours. Il devra également supporter les frais juridiques qu’aura coûtés cette procédure.
Guy Etom